Unis dans la Concorde et la Fraternité, éveille toi Gabon !

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A la faveur d’une récente recomposition partielle de notre paysage politique, ponctuée notamment par la démission de certains cadres du PDG (Parti Démocratique Gabonais), un débat a cours actuellement dans notre pays sur les questions identitaires, ethniques en particulier. En réalité, le thème n’est ni original, ni nouveau. Mais il est abordé de manière différente, quasiment inverse de celle des années 70 et 80, à l’ère du monopartisme où le discours nationalitaire était à la mode.

C’est un débat qui mérite d’être recentré en l’éloignant des réactions épidermiques qu’il suscite aujourd’hui. Il s’agit de savoir pourquoi la prégnance de l’ethnie est contestée, non point celle de la nation. Il faut bien sur reconnaitre que l’ethnie est une réalité sociale au Gabon, comme ailleurs en Afrique, alors que la nation est seulement une construction politique. Je sais que la précision des concepts est un exercice difficile et utile. Cependant elle ne doit pas toujours être un préalable à la discussion, elle ne change pas nécessairement la réponse à donner à des problèmes concrets. La méthodologie de la définition des droits démocratiques n’est pas forcément liée à l’étiquette conceptuelle que l’on accolera à des communautés cristallisées autour de faits de conscience. J’invite donc à éviter le plus possible de malentendus sur les problèmes de rivalité politique dans un contexte ethnique.

En effet, le Gabon se compose de tribus et d’ethnies qui, par nécessité et par décret de l’histoire, se sont retrouvées pour construire un vivre ensemble, chacune apportant quelque chose aux autres. C’est une nation arc-en-ciel pourrait-on dire. C’est donc une vue de l’esprit, si ce n’est de la mauvaise foi, que de vouloir brider l’ethnie. D’ailleurs, les associations et cercles qui affichent clairement leurs particularismes ethniques ne sont pas à blâmer. Ce qui est curieux, en revanche, c’est de constater que l’apologie identitaire se banalise chez certains alors qu’elle fait ruer dans les brancards lorsqu’il s’agit d’autres.

Nous savons aussi que l’émergence du sentiment national au Gabon est un phénomène né du leitmotiv du Président Léon Mba: Gabon d’abord. Le père de l’indépendance gabonaise lançait là un processus de construction d’un intérêt national devant aboutir à la nationalisation en profondeur de la société gabonaise. Par l’intermédiaire de puissants instruments de médiation, le PDG, parti unique, crée par le Président Bongo Ondimba en 1968, est parvenu à faire en sorte que tous les gabonais se sentent concernés par l’œuvre de construction nationale.

Certes, ce qui fonde l’autonomie de l’expression (notamment politique) de l’ethnicité relativement au contexte social actuel n’est rien d’autre que le fait que, liée à ce contexte social, elle ne saurait être opératoire dans le présent sans des signes de reconnaissance qui puisent leurs sources dans une histoire parfois lointaine. On aura donc des formes de mobilisation sociale qui ne correspondront pas objectivement aux données politiques réellement existantes, mais répondront à la vision de ces données au travers du prisme de signes de reconnaissance conditionnés par les formations sociales du passé. C’est à ce niveau du prisme que s’accordent aujourd’hui, comme hier au sortir de la Conférence nationale, des politiciens organiques et parfois sans scrupules, ceux-là qui s’évertuent à instrumentaliser leur origine ou leur ethnie, comme d’autres leur religion, pour assouvir des ambitions politiques démesurées. Voilà bien pourquoi beaucoup de gabonais ont toujours pensé que l’ethnicité faisait dévier la lutte politique de ses objectifs réels.

Le Gabon est solide, même s’il coexiste avec des degrés inférieurs d’ethnicité. L’existence d’un Etat un tant soit peu durable fait apparaitre un sentiment national, un sentiment de citoyenneté, un patriotisme constitutionnel que traduit l’acceptation, bien davantage encore, l’habitude de vivre ensemble dans un même pays et, en l’occurrence, dans une même République. Inspirés par un divisionnisme suicidaire, les chantres du repli identitaire et les tenants du discours politique tribal ont le grand tort d’oublier que chaque groupe ethnique ou linguistique au Gabon se définit autant par son identité propre, son ipséité que par l’ouverture aux autres, que l’identité est à la fois singulière et plurielle, qu’il y a une parfaite dialectique de l’identité ethnique et de la nation dans notre pays. Vouloir faire reposer la politique sur l’ethnie n’est pas seulement une erreur, c’est une chimère, c’est se tromper d’époque.

En un mot, la véritable base d’une nation, avant la langue, avant l’ethnie, c’est le consentement des populations, c’est leur volonté de continuer à vivre ensemble. Ainsi le Gabon est une entité collective, distincte des individus et des ethnies qui la composent. Politiquement, l’horizon de l’idée de nation, entendue sur ce mode, est donc ,la communauté démocratique, définie par l’adhésion volontaire à des principes publiquement proclamés.

SKB

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