La visite d’Emmanuel Macron au Gabon a été présentée comme une étape importante pour “ réinventer ” la coopération entre Paris et Libreville.
Les échanges ont porté sur plusieurs axes stratégiques : développement économique, préservation de l’environnement, partenariat militaire redéfini et accompagnement des grands chantiers d’infrastructures.
Cette démarche s’inscrit officiellement dans une volonté de rompre avec les pratiques anciennes et d’ouvrir une nouvelle ère fondée sur le respect mutuel, la souveraineté gabonaise et un *partenariat gagnant-gagnant.
Pourtant, malgré ces annonces prometteuses, de nombreuses critiques émergent. Plusieurs observateurs soulignent que la France semble vouloir moderniser sa présence sans renoncer à ses positions historiques, parfois héritées des mécanismes de la *Françafrique.* D’autres estiment que les projets présentés restent largement pilotés par les institutions françaises (AFD et autres), laissant planer un doute sur l’équilibre réel des retombées. Enfin, la question environnementale, bien que essentielle, apparaît souvent déconnectée des besoins immédiats des populations en matière d’emploi, de transformation industrielle et de formation.
Ce contraste entre discours et perception révèle un enjeu central : la relation entre le Gabon et la France ne pourra évoluer durablement que si les engagements annoncés se traduisent en actions concrètes, visibles et bénéfiques pour le peuple gabonais.
Notre position et nos attentes
Nous espérons fermement que cette visite ne restera pas au stade des déclarations et des promesses politiques.
Le peuple gabonais observe, avec exigence et lucidité, chaque engagement annoncé.
Les mots ne suffisent plus : nous attendons des résultats tangibles, mesurables et adaptés aux besoins réels du pays.
À cela s’ajoute un point de fond trop souvent éludé : le courage politique de revisiter les accords coloniaux qui structurent encore, en profondeur, les relations économiques et stratégiques entre le Gabon et la France.
Ces accords constituent aujourd’hui un frein majeur à notre développement, car ils limitent notre souveraineté économique, entravent la transformation locale et perpétuent des dépendances héritées du passé.
Il est regrettable que ce sujet ne fasse jamais l’objet d’un débat frontal, alors même qu’il conditionne une grande partie de notre marge de manœuvre nationale.
Pour une coopération réellement utile au Gabon
Si la France souhaite véritablement accompagner le Gabon dans une relation renouvelée, équilibrée et respectueuse, elle pourrait s’engager sur des axes concrets qui renforcent notre autonomie :Former nos jeunes et nos entrepreneurs dans l’agriculture, afin de réduire la dépendance alimentaire du pays.
Développer des formations locales dans l’élevage, secteur essentiel pour stabiliser les prix et créer des emplois.
Accompagner la montée en compétence dans les métiers de la transformation des minerais, pour que nos ressources soient transformées ici, et non exportées brutes.
Plus largement, soutenir des programmes de formation professionnelle orientés vers l’industrialisation, l’innovation et les nouvelles technologies.
Ces domaines représentent des leviers structurants pour un Gabon fort, souverain et prospère. Ils correspondent aussi aux interdictions et ambitions annoncées par les autorités gabonaises en matière d’importations, de transformation locale et de diversification économique.
C’est sur ces sujets que nous attendons la France, et non dans les schémas dépassés d’assistance ou d’ingérence.
La visite de Macron ouvre des perspectives, mais elle réactive aussi des interrogations légitimes.
Entre promesses, attentes et critiques, une vérité demeure : le Gabon veut avancer, mais avancer libre.Il appartient désormais aux partenaires étrangers dont la France de démontrer, par des actes concrets, qu’ils respectent et soutiennent réellement cette ambition nationale.
Elvio !

