La pluie diluvienne qui s’est abattue récemment sur Libreville a une fois de plus plongé plusieurs quartiers de la capitale dans une situation dramatique. Des familles se sont retrouvées les pieds dans l’eau, des habitations envahies, des voies impraticables et des populations contraintes de faire face, souvent seules, aux conséquences d’un phénomène pourtant récurrent. Si les fortes pluies relèvent d’un aléa naturel, leurs effets dévastateurs, eux, interrogent directement l’action – ou l’inaction – des pouvoirs publics.
Chaque saison des pluies ramène le même scénario : inondations, sinistrés, promesses d’évaluation et annonces de recensement. Mais sur le terrain, beaucoup de familles touchées doutent de la rapidité et de l’efficacité réelle de l’aide gouvernementale. Les images de quartiers comme Nzeng-Ayong submergés soulèvent une question essentielle : le dispositif de prévention et de gestion des catastrophes est-il réellement opérationnel ?
Cette interrogation est d’autant plus légitime qu’au même moment, le débat public est alimenté par l’annonce ou l’évocation d’une taxe sur le titre foncier. Demander davantage d’efforts financiers aux citoyens implique, en retour, une obligation de résultats. Le peuple gabonais est en droit d’attendre que les ressources collectées servent à améliorer concrètement les conditions de vie : assainissement des bassins versants, curage régulier des caniveaux, aménagement urbain cohérent et dispositifs d’urgence efficaces pour les sinistrés.
Aujourd’hui, le doute persiste. Le recensement des victimes, souvent présenté comme une première étape, ne saurait suffire s’il n’est pas suivi d’actions visibles, rapides et équitables. Les familles qui ont tout perdu n’ont pas besoin de communiqués, mais d’abris temporaires décents, d’un soutien matériel et d’un accompagnement réel pour se relever.
Ce contexte fait de la crise actuelle un test grandeur nature pour le gouvernement. C’est le moment de démontrer, par des actes concrets, qu’il s’agit d’un gouvernement sérieux, capable d’anticiper, de protéger et d’assister sa population. À défaut, la méfiance grandira et la perception d’un décalage entre les discours officiels et la réalité vécue par les citoyens se renforcera.
Les Gabonais n’attendent pas l’impossible. Ils attendent simplement un État qui assume pleinement ses responsabilités, surtout lorsque la nature met en lumière, sans détour, les failles de la gouvernance urbaine et sociale. La réponse apportée aux sinistrés de Libreville dira beaucoup sur la crédibilité des réformes annoncées et sur la confiance que le peuple peut encore accorder à ses dirigeants.

